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Fragmentation de l’écosystème video : le nouveau visage de la TV ?

Fragmentation de l’écosystème video : le nouveau visage de la TV ?
Avec YouTube, Netflix, Disney+, MyCanal, Prime Video, TF1+ et bientôt M6+ et Max... l'offre vidéo devient protéiforme.

Alors qu’Amazon lance aujourd’hui ses offres publicitaires sur Prime Video en France et que les acteurs historiques mettent le paquet sur le streaming, l’offre devient protéiforme pour le consommateur et le marché publicitaire dans un contexte de baisse des audiences de la TV linéaire. YouTube, Netflix, Disney+, MyCanal, Prime, TF1+ et bientôt M6+ et Max… comment les agences et les annonceurs abordent-ils ce changement de paradigme ? Souaade Agmir, directrice du trading digital chez Publicis Media livre son analyse à l’occasion de Total Video Forum, organisé par The Media Leader.

The Media Leader : Avec la multiplication des offres, en quoi la fragmentation de l’écosystème vidéo est-il une chance pour le marché publicitaire ?

Souaade Agmir : La fragmentation de cet écosystème, c’est bien l’illustration du dynamisme du marché vidéo, qui s’enrichit et surtout qui se transforme, on voit bien la dynamique des investissements sur ce scope, d’après le SRI ce marché croît de +11%. Chez Publicis Media, nous sommes bien au-delà de ce benchmark, il y a une polarisation de plus en plus forte des stratégies entre la vidéo et la performance. Cette fragmentation c’est évidemment une opportunité pour le marché de tester et de scaler de nouvelles approches d’autant plus clé dans un contexte de baisse des audiences de la TV linéaire. Des nouvelles approches qui sont de plus en plus qualitatives, que ce soit sur le contenu mais aussi sur l’expérience publicitaire et c’est une des grandes différences avec la VOL historique, on voit un standard qui s’instaure autour du grand écran. YouTube, c’est 40% de leurs audiences, en Bvod on est en moyenne à 70% et en svod à 80%. C’est le nouveau visage de la TV, désormais protéiforme, tout aussi puissante et qui offre des possibilités de ciblage beaucoup plus avancées. C’est un changement de paradigme, la frontière entre la TV linéaire et le streaming est et doit être de plus en plus perméable.

Imaginez que pour faire un plan YouTube, TF1+, Amazon et Netflix, il faille activer 3 DSPs différents, c’est une usine à gaz opérationnelle et surtout c’est contreproductif

The Media Leader : En quoi est-elle un obstacle pour le marché publicitaire ?

S.A. : Cette fragmentation est aussi un challenge, comme je le disais, le marché est très hétérogène, les positionnements et les offres des différents acteurs vidéos sont divers, c’est une formidable richesse mais c’est aussi d’une formidable complexité. Une complexité à aligner les offres et avoir une comparabilité cohérente, on ne peut pas comparer au même niveau un acteur A qui a 80% d’audience sur écran TV avec un acteur B qui en a seulement 30%. Compliqué également de comparer un acteur dont le contenu est gratuit avec celui dont le contenu est payant. Il n’y a plus un seul standard mais plusieurs standards qui nous conduisent à créer des systèmes de mesure custom pour bien pondérer l’ensemble des variables d’efficacité media et ne pas comparer des choux et des carottes, c’est aussi une nécessaire transformation des métiers du planning et du buying vidéo. Il y a également un très fort enjeu autour de l’accessibilité des inventaires, il n’y a jamais eu autant d’offres mais elles n’ont jamais été aussi fermées sur elles-mêmes en ayant des exclusivités d’accès sur des plateformes spécifiques. C’est historiquement le cas avec YouTube et DV360. C’est le cas avec Amazon et AAP mais également avec Netflix et Xandr, seul Disney+ a adopté une stratégie plus ouverte dès le lancement. Imaginez que pour faire un plan YouTube, TF1+, Amazon et Netflix il faille activer 3 DSPs différents, c’est une usine à gaz opérationnelle et surtout c’est contreproductif, cela va à l’encontre des bénéfices qu’offre l’adressabilité et qui permet de dédupliquer les audiences et d’optimiser le reach, ce marché doit être plus ouvert sur l’accessibilité des inventaires afin de bénéficier pleinement de tout son potentiel de croissance.

Souaade Agmir, directrice du trading digital chez Publicis Media

The Media Leader : comment les annonceurs abordent-ils les nouvelles offres des plateformes américaines ? L’arrivée de Netflix, Disney et Amazon aujourd’hui est-elle un game changer ?

S.A : Ce sont évidemment de nouvelles opportunités de toucher les audiences, dans des contextes premium, brand safe et avec des possibilités de ciblages plus granulaires. Les audiences publicitaires de ces plateformes sont en pleine croissance et elles viennent bousculer aussi le marché historique en amenant des expériences publicitaires différentes. Ce sont aussi des opportunités plus poussées sur l’intégration publicitaire notamment dans le contenu, que ce soit du sponsoring jusqu’au placement de produit sur mesure dans un contenu spécifique. On teste, on tire les enseignements et on capitalise. L’enjeu sur ces plateformes c’est le scale, notamment sur les audiences, de passer d’un rôle de complémentarité sur une cible ou un contenu spécifique à un levier générateur de puissance. Le déploiement et l’activation de la data retail et surtout de la mesure notamment business de cet impact vidéo est très prometteur, c’est un peu le graal mais cela ne fonctionnera que si la puissance est au rendez-vous. Amazon communique sur 9 millions d’abonnés qui sont ceux de l’offre Prime incluant la livraison, il faudra voir notamment dans les 1ères campagnes si cette puissance revendiquée et les performances de la data retail sont bien au rendez-vous. Cela nous amène à une question cruciale, celle d’une mesure alignée et certifiée par un tiers de l’ensemble des acteurs vidéo.

Il y a une volonté plus forte chez les acteurs Bvod de faire tomber les frontières entre leurs différentes offres.

The Media Leader : Les plateformes Bvod innovent comme TF1+ et M6+. Quel impact sur le marché ?

S.A : C’est nécessaire, nécessaire pour les broadcasters qui doivent adapter leur modèle à ce nouveau paradigme, évoluer d’un modèle TV à un modèle full vidéo sur le streaming. C’est nécessaire s’ils veulent rester compétitifs et concurrencer les grandes plateformes notamment YouTube. Ce qui est néanmoins challenging c’est que la concurrence est déjà bien installée, elle est globale et a aussi de gros moyens sur le développement des contenus. Et en même temps les acteurs de la Bvod ont un atout essentiel, la relation historique et le poids toujours important sur la TV linéaire. Il y a une volonté plus forte chez les acteurs Bvod de faire tomber les frontières entre leurs différentes offres, cela fait clairement avancer le marché, cela amène plus de simplicité et de fluidité, on se réjouit de voir cet alignement interne chez eux maintenant il faut aussi rester vigilant sur le sens de cet alignement d’un point de vue coûts médias.

The Media Leader : Qu’attendez-vous du marché en matière de mesure d’audience ?

S.A : La mise en place d’une mesure alignée et surtout holistique, qui mesure au même niveau l’ensemble des acteurs vidéos et pas seulement une partie. C’est essentiel. Nous avons besoin d’un tiers de confiance pour permettre cette comparabilité des offres et faciliter le média planning vidéo. Les plateformes doivent adopter le même standard de mesure, ce n’est pas un « nice to have », c’est un pré-requis. C’est comme cela qu’un marché sain fonctionne et la vidéo ne doit pas faire exception, de surcroit compte tenu de la part de la vidéo dans les investissements publicitaires et du taux de croissance de ce marché. Ce sujet est éminemment stratégique.

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