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L’avenir des sites d’information à l’ère des GAFAM – par François-Xavier Le Ray (The Trade Desk)

L’avenir des sites d’information à l’ère des GAFAM – par François-Xavier Le Ray (The Trade Desk)
François-Xavier Le Ray, General Manager France chez The Trade Desk.

Par François-Xavier Le Ray, General Manager France chez The Trade Desk.

Alors que le marché de la publicité continue de croître, une tendance alarmante émerge en France. Les projections de l’ARCOM indiquent que d’ici 2030, quatre plateformes – les GAFA – accapareront jusqu’à 60% du marché de la publicité digitale, ne laissant qu’une maigre part de 5% aux sites d’information. Malgré une transition numérique réussie et le fort développement de leur audience, les médias n’ont pas réussi à enrayer ce phénomène de décroissance. Or, historiquement, la publicité a toujours été l’un des piliers du modèle économique de la presse, soutenant la production et la distribution de contenu de qualité. Les fermetures de rédaction et la montée des « fake news » – en particulier dans l’écosystème des « walled gardens » – devraient tous nous alarmer.

Ces difficultés offrent néanmoins la possibilité de réimaginer la manière dont les informations peuvent être financées et peuvent débloquer de nouvelles opportunités publicitaires pour de nombreuses marques. Est-il encore temps de résoudre ce déséquilibre ?

Le rôle essentiel de la publicité

Le secteur publicitaire a manqué à son devoir de sensibilisation et d’éducation sur la valeur de la publicité : elle contribue à la gratuité d’Internet et au financement du journalisme libre et indépendant. Cet échec de communication a conduit à une méconnaissance généralisée du public, bien peu conscient des rouages qu’implique un accès gratuit à l’information.

Or, si les rédactions ne disposent plus des ressources financières nécessaires, c’est à la fois leur indépendance éditoriale qui est compromise mais la survie même du métier de journaliste, déjà challengé voire remplacé par l’intelligence artificielle. La diminution des revenus publicitaires par impression affecte donc directement les éditeurs et plus généralement la diversité du paysage médiatique.
Actuellement, bien que les internautes passent 60 % de leur temps sur l’open web, c’est-à-dire en dehors des GAFA, 70 % des investissements publicitaires se dirigent pourtant vers ces plateformes fermées. En effet, les « walled gardens » attirent les annonceurs en raison de leur capacité supposée à atteindre en masse les utilisateurs et à fournir des mesures d’efficacité.

Il doit être aussi simple pour une agence ou un annonceur d’acheter une publicité sur un réseau social que sur un site média. Le défi pour les acteurs plus modestes de cet écosystème est donc de créer des outils qui permettent aux acteurs de la chaîne publicitaire de rivaliser à armes égales avec les géants de la technologie, et de tirer pleinement parti de l’inventaire sur l’open web, où la transparence et la concurrence ouverte pour les impressions publicitaires est réelle.

Une publicité plus ciblée se traduit par plus de revenus pour les éditeurs

Bonne nouvelle : il existe des solutions pour que les éditeurs de presse optimisent leur inventaire publicitaire sur l’open web. Alors, comment mieux monétiser les audiences numériques ?
Le prix d’une publicité dépend de la pertinence de l’information que l’éditeur est en mesure de fournir à l’annonceur. Ainsi, il existe un lien direct entre les données et le prix d’une publicité. Si l’annonceur dispose de plus d’informations sur un groupe cible, il sera prêt à payer davantage pour l’atteindre. Une même publicité peut donc être vendue 10 centimes ou 1 euro en fonction des informations fournies. Les cookies tiers ont jusqu’alors joué un rôle essentiel pour fournir cette granularité. L’arrêt des cookies tiers représente un risque réel pour les éditeurs qui utilisent un navigateur.

Certains éditeurs constatent d’ailleurs déjà une baisse d’environ 30% des CPM sur Chrome depuis le début de leur suppression. De fait, certaines études pointent une chute de 70% des CPM dans les navigateurs sans cookies. Cette diminution s’explique donc en partie par une dépréciation des informations disponibles pour les annonceurs et la pertinence des publicités.

Mais d’autres raisons peuvent expliquer les difficultés rencontrées par les organes de presse : les taux d’authentification des visiteurs sur les sites d’information sont étonnamment bas. Les annonceurs ne peuvent pas accorder une grande valeur aux impressions publicitaires s’ils ne savent pas qui les voit. Pourtant, les éditeurs auraient des arguments à faire valoir : ils bénéficient d’un lectorat haut de gamme tout à fait susceptible de séduire les annonceurs.

Dotés des bonnes solutions d’identité, les éditeurs seraient en mesure d’avoir des données approfondies de première main sur leur base de lecteurs et pourraient construire des profils de consommateurs authentifiés, avec pour conséquence vertueuse une augmentation de la valeur de leurs publicités.

Une stratégie d’identité solide

Une connaissance approfondie de son audience est donc cruciale pour élaborer un plan de monétisation efficace et gagner la confiance des annonceurs. Cette connaissance doit nécessairement impliquer une stratégie d’identité solide et une stratégie d’authentification.

Le secteur de l’adtech travaille depuis plusieurs années à construire un nouvel écosystème qui permet aux annonceurs d’avoir un bon retour sur investissement sur tous les devices et aux éditeurs d’optimiser leurs revenus. Les éditeurs doivent étudier de près ces différentes solutions : certaines sont basées sur des cookies de première partie, d’autres sont liées à une connexion (log-in) du lecteur ; certaines nécessitent des ressources informatiques importantes, d’autres sont légères et ouvertes. Ces solutions d’identité cross-canal en open-source et des outils d’authentification à signature unique peuvent redonner aux éditeurs le contrôle nécessaire pour faciliter leurs propres personnalisations et reprendre le contrôle de leur monétisation. En offrant des données précises sur leur audience, les éditeurs peuvent proposer des espaces publicitaires plus pertinents et donc plus attractifs pour les annonceurs, ce qui pourrait encourager un rééquilibrage des investissements publicitaires vers les médias d’information.

Il est temps de repenser le modèle économique de la presse pour assurer la pérennité du journalisme de qualité dans un environnement numérique dominé par les géants de la tech. Les défis sont nombreux, mais avec une approche innovante et collaborative, l’écosystème numérique peut surmonter les obstacles. En rééquilibrant et en diversifiant leurs mix media, les annonceurs contribueraient à préserver la diversité du paysage médiatique et à soutenir le journalisme indépendant.

La rédaction de The Media Leader n’a pas participé à l’élaboration de ce contenu.

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