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Mathieu Roche (ID5) : « Comparer un ID utilisateur et un ID devices ne veut rien dire !  »

Mathieu Roche (ID5) : « Comparer un ID utilisateur et un ID devices ne veut rien dire !  »

Pionnier de la recherche d’identifiants alternatifs aux cookies, ID5 poursuit le déploiement de son identifiant réconcilié cross-domaines, malgré l’intensification de la concurrence et la décision de Google de sauver les cookies tiers sur Chrome. Explications de Mathieu Roche, son co-fondateur et CEO.

The Media Leader : En juin dernier, dans un dossier consacré aux identifiants alternatifs aux cookies tiers, The Media Leader vous désigne comme le « pionnier challengé » du secteur. Où en êtes-vous de votre développement ? Etes-vous impacté par la décision de Google de finalement conserver les cookies tiers ?

Mathieu Roche : Nous nous sommes lancés en 2017, en amont du RGPD et bien en amont de la décision de Google de supprimer ou garder les cookies tiers sur Chrome. Le constat est le même aujourd’hui : les cookies ne sont pas assez efficaces pour les acheteurs, ne permettent pas aux vendeurs de valoriser au mieux leurs inventaires, et enfin ne permettent pas à l’écosystème de mettre en place les contrôles obligatoires depuis le RGPD. 

Cela reste vrai sur Chrome, et est déjà une réalité sur les autres navigateurs depuis longtemps. Nous travaillons avec 550 partenaires techniques qui intègrent ID5, nous n’en avons perdu aucun depuis la décision de Google. Nous travaillons avec les principaux acteurs du marché : des CDP comme Zeotap, Mediarithmics ou Adobe, des DSP comme The Trade Desk, Adform et Virtual Minds, et des SSP comme Equativ, Pubmatic ou OpenX ; tous intègrent l’ID5 ID dans leurs process, et l’ID5 ID est plus que jamais le référent de l’identité. 

Nous allons continuer à travailler avec les acteurs de l’écosystème Web, et nous étendre auprès des autres canaux comme l’audio, via notre collaboration avec Triton Digital, filiale du géant américain d’iHeartMedia. Nous travaillons aussi de plus en plus avec les acteurs TV comme M6 en France ou CNN aux États-Unis. Enfin, nous misons aussi sur l’environnement des apps, où l’on aide les développeurs à reprendre la main sur la relation avec leurs utilisateurs. 

Je garde donc le terme pionnier mais nous ne sommes pas tant challengés que celà. Malgré quelques initiatives qui ont émergé au cours des dernières années, nous sommes encore particulièrement en avance, et ce n’est pas nous qui le disons : le service Sincera, qui mesure l’adoption des solutions d’identifiants par les éditeurs, indique que nous sommes installés sur deux à trois fois plus de sites que les autres, notamment les solutions comme le RampID de LiveRamp ou le UID2.0 de The Trade Desk. 

Ce qui nous distingue c’est notre antériorité et notre positionnement : nous nous sommes lancés il y a sept ans pour aider les sites à mieux monétiser leurs inventaires, le tout en étant totalement neutre. Nous ne sommes pas partie prenante de la transaction publicitaire, puisque nous n’achetons ou ne vendons ni donnée ni inventaire. Nous ne fournissons simplement que l’infrastructure permettant d’identifier quasiment l’ensemble des terminaux connectés à Internet en Europe, aux États-Unis et de plus en plus en Asie.

The Media Leader : C’est ce positionnement d’infrastructure, ainsi que la gratuité de votre solution pour les éditeurs, qui explique votre fort taux d’adoption, à la différence d’autres solutions déterministes ?  

M.R. : Il y a deux sujets dans ce que vous dites. Nous revendiquons notre rôle d’infrastructure. L’identité n’est pas un service que l’on cherche à acheter, c’est un moyen de fournir le service recherché : monétiser des audiences et afficher des publicités auprès de cibles spécifiques. 

Quand vous achetez une voiture, elle est livrée avec les pneus. Ils sont essentiels au bon fonctionnement de la voiture et c’est rarement une option que l’on demande au client de choisir !  

L’identité, c’est pareil : un moyen pour qu’un SSP ou qu’un DSP achète de la pub, qu’un adserver soit capable de mesurer leur efficacité, etc. Ce n’est pas un service, mais une fonction de ces services. C’est pour ça que nous ne collaborons rarement directement avec les annonceurs et les agences, mais plutôt avec les opérateurs techniques de la chaîne de valeur publicitaire.

Ensuite, il y a une deuxième chose : la distinction entre déterministe et probabiliste. On a l’impression que la première prime sur la seconde, alors qu’il s’agit de méthodes complémentaires qui s’enrichissent l’une l’autre. Plus nous avons de signaux et plus nous pouvons améliorer nos algorithmes qui fonctionnent sur la base d’un intervalle de confiance de plus de 90%. Quand nous fournissons le même identifiant à un device sur deux domaines différents, nous sommes quasiment certains que c’est bien le même device. 

Et si on rentre dans les détails des méthodes des différentes solutions d’ID, on se rend vite compte qu’elles sont très rarement 100% déterministe ou 100% probabiliste.

The Media Leader : Des concurrents comme Utiq ou Epsilon avec CoreID travaillent tout de même sur des données opérateurs ou transactionnelles relativement fiables… 

M.R. : Le problème que nous cherchons à résoudre, c’est celui de la réconciliation entre les données que possèdent les commerçants et les marques sur leurs clients et les devices de ces mêmes clients. Vous aurez très rarement accès à l’adresse postale, à l’email ou au numéro de téléphone de quelqu’un qui lit un article de presse ou qui joue à un jeu sur un site, donc il faut faire appel à des méthodes de reconnaissance basés sur des algorithmes pour trouver un équilibre entre scalabilité et précision. 

The Media Leader : Dans notre dossier, l’accent est aussi mis sur le taux de renouvellement trop important de votre identifiant, au détriment de sa fiabilité. Que répondez-vous à cela ? 

M.R. : C’est un argument qui s’appuie sur une « étude » réalisée par un concurrent donc ce n’est pas vraiment une base de travail neutre et scientifiquement prouvée ! Par ailleurs, je voudrais attirer votre attention sur la nécessité de distinguer notre identifiant, qui est associé à un device, à d’autres identifiants comme celui d’Utiq par exemple, qui sert à identifier un abonné qui peut posséder plusieurs devices. Comparer un identifiant pour utilisateur et un identifiant pour devices ne veut rien dire ! 

Sur le sujet spécifique du taux de renouvellement, nous sommes plus que jamais confiants dans notre solution, que nous améliorons régulièrement. Nos algorithmes font l’objet de publications scientifiques, dans lesquelles nous détaillons notre manière d’optimiser notre taux de recall, c’est-à -dire de diminuer le taux de « faux positifs », lorsqu’on associe le même identifiant à deux devices différents. 

Pour rappel, nous attribuons un identifiant à chacun des 150 000 sites avec lesquels nous travaillons. Ces identifiants sont déposés sous la forme d’un cookie « 1st Party » sur les devices des internautes qui les visitent. Ils ont une durée de vie d’environ 30 jours. Si vous vous reconnectez dans ce laps de temps, on est capable de lire cet identifiant. Sinon, nous recréons un identifiant. 

Notre but est ensuite d’utiliser nos modèles de clustering pour associer ces identifiants propriétaires à un même device. Pour cela, l’algorithme utilise tous les signaux dont nous bénéficions : l’email crypté lorsqu’il est disponible, mais aussi l’url des pages consultées, le timestamp, l’user ID des machines, l’adresse IP… Le tout de manière discriminante bien sûr : nous n’allons pas accorder d’importance à une adresse IP associée à une grosse entreprise à La Défense qui héberge plusieurs milliers de personnes qu’à un foyer dans lequel on ne détecte qu’une ou deux devices.

L’objectif est d’aboutir à un ID qui permettra de reconnaître un segment d’audience, de cibler une campagne et de gérer la fréquence d’exposition à cette campagne sur différents sites, et d’en mesurer la performance. Nous avons donc tout intérêt à ne pas nous tromper quand nous attribuons cet ID !

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