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X veut être moins dépendant de la publicité

X veut être moins dépendant de la publicité
Après une année 2023 bordée de polémiques, X veut prendre sa revanche. Si les annonceurs sont désormais moins attendus, les utilisateurs suivront-ils ?

Une application pour tout faire, une « everything app » comme Elon Musk aime à l’appeler. Derrière le rachat de Twitter en avril 2022, un projet : la création d’une application pour accompagner les utilisateurs dans tous les pans de leur vie. Et un modèle, chinois : WeChat – qui permet de discuter avec ses amis, d’échanger avec d’autres utilisateurs mais aussi d’effectuer des paiements. « C’est la référence qui est souvent citée. Il n’y a pas la volonté de faire un copycat de WeChat, mais cela se rapproche », nous confirme Laurent Buanec. Si le désormais directeur général X en France, et en Allemagne, Autriche et Suisse (DACH), est arrivé chez Twitter en 2013 pour prendre en charge la stratégie de marque, ne lui parlez plus de cet ancien réseau social. X, ce n’est plus ça. « Les gens ont encore le réflexe Twitter, mais X n’est pas construit de la même manière ». À Paris, Twitter a quitté la rue Scribe, et seulement une vingtaine de collaborateurs, principalement commerciaux, s’activent désormais en coulisses pour préparer la suite.

Trouve ton job sur X

Car chez X, ça va très vite. Encore cette semaine, Elon Musk a annoncé la mise en ligne prochaine de l’algorithme de Grok, l’IA maison bâtie par xAI, société sœur spécialisée dans les développements autour de l’intelligence artificielle. Mais aussi la possibilité de pouvoir regarder les vidéos diffusées sur X via les TV connectées, à l’image d’un YouTube. Ou encore le lancement d’Articles, fonctionnalité à l’image de LinkedIn qui permet à de publier de longs articles sur la plateforme. « On construit un endroit où on aura accès à tous les services possibles », ajoute Laurent Buanec. Si l’âme de X restera la brique conversationnelle, « ce truc hyper fort, qui restera le cœur du réacteur », la société multiplie les développements. A tel point qu’on pourrait passer à côté de certains… X a notamment lancé il y a peu « Hiring », une solution de mise en relation entre employeurs et candidats. Cela vous fait penser à quelque chose ? « On ne va pas copier LinkedIn, mais nos utilisateurs échangeaient déjà autour de leur recherche d’emploi. Désormais, on leur donne des fonctionnalités pour guider les discussions. X, comme Twitter, c’est  avoir l’info le plus rapidement possible, et pour le secteur de l’emploi, c’est l’idéal ». La plateforme accessible sur laptop pour le moment revendique 1 million d’offres d’emploi dans le monde.

« On n’attend jamais qu’un produit soit abouti à 100% avant de déployer ». Un test and learn permanent. « Les équipes sont mobilisées à fond sur l’Everything App ». Début mars, X a lancé la possibilité de passer des appels audio et vidéo, sans numéro de téléphone, depuis les DM. Une fonctionnalité réservée aux abonnés Premium, désormais activée par défaut sur tous les comptes, qui se déploie progressivement sur l’ensemble des marchés adressés par X. Derrière ces nombreux développements, c’est le business model de la société qui se dessine. Un objectif : « être moins dépendant de la publicité », nous explique Laurent Buanec. « Il fallait diversifier ». X a mis en place différents types de membership, pour les particuliers et les entreprises. Un premier niveau « Basique » à 3,60€ par mois permet de pouvoir publier des tweets plus longs et de les éditer, notamment. Un deuxième niveau « Premium » à 9,60€ par mois réduit de moitié la publicité visible, booste la visibilité des publications, et permet de personnaliser l’affichage des fonctionnalités, de pouvoir mettre en place une souscription pour ses abonnés ou d’accéder au fameux graal, la coche bleue qui certifie le compte. Enfin, vous pouvez devenir « Premium+ » pour 19,20€ par mois, pour pouvoir écrire des articles et ne plus voir aucune publicité.

Faire payer tout le monde ?

Pour les entreprises qui souhaitent être certifiées avec la coche dorée et pouvoir recruter des talents via la nouvelle plateforme d’emploi, un premier niveau d’abonnement à 2280€ par an est disponible. Un « accès complet » est bien évidemment disponible, avec un boostage doublé et la possibilité d’affilier ses collaborateurs : un compte affilié bénéficie de la certification (dénotée par une coche « Premium », dorée ou grise) ainsi que d’un badge d’affilié, c’est‑à‑dire d’une miniature de l’image de profil de l’entreprise mère, qui est affichée à côté de sa coche. Cela coûtera à l’entreprise 11400€ par an. X encourage les entreprises à s’abonner en leur versant pour une période limitée un crédit publicitaire à dépenser chaque mois. « À peu près le même niveau d’ad spend, 1000€ de crédits par mois », selon le DG X France.

La société aura bien sûr constaté le développement par Meta de Threads : « ils ont leur stratégie, on a la nôtre. On regarde par curiosité ce qu’ils font mais on trace notre route ». Pour Laurent Buanec, pas d’inquiétude. « Cela fait des années qu’on est dessus, ces sujets-là ne sont pas évidents, ne s’improvisent pas, notamment sur la compliance EU ». Et de revendiquer une transparence totale, contrairement à la concurrence. Chez X, la vigilance se porte davantage du côté des robots, « une lutte permanente, qui fonctionne bien ». L’application mise d’ailleurs sur les abonnements payants pour certifier un maximum d’utilisateurs. « Nous n’avons pas la volonté de faire payer tout le monde, mais oui cela entre dans le cadre de la lutte anti-robots, avec un coût d’entrée faible ». De l’autre côté, la sister-company xAI travaille sur Grok, le chatbot d’intelligence artificielle générative, inspiré de Jarvis. Pour y accéder, là encore, l’utilisateur doit être Premium. « xAI nous fournit fournit des briques sur les technos : modération, optimisation publicitaire… et Grok, qui est pluggé sur notre base de data en temps réel, personne ne fait cela. Les autres utilisent de la data plus froide ». Avec 540 millions de posts par jour dans le monde, Elon Musk revendique une IA ultra-précise. « Et pertinente sur l’analyse des tendances, ce qui est commenté… très bonne sur le prédictif ». L’IA devrait arriver sur le marché français en 2024.

Du live streaming sur X

Pour parachever l’Everything App, après les espaces audio « Spaces » notamment, reste le paiement. « X est né dans la tête d’Elon au moment de la création de PayPal. Il voulait déjà à l’époque aller plus loin que le simple paiement ». Côté transactionnel, X se prépare : 23 licences de transmetteur de fonds déjà acquises aux États-Unis. « La Californie et New-York arrivent très bientôt, ça va être un vrai booster », s’enthousiasme Laurent Buanec. L’objectif : faciliter les paiements entre utilisateurs dans un premier temps, puis pouvoir gérer ses finances depuis X. « On a commencé à élaborer quelques briques : les créateurs peuvent demander des souscriptions à leurs abonnés, c’est un premier pas ». Ensuite viendra une partie commerce, d’achat direct vers des retailers en ligne. Pour quand ? 2024 aux US, et 2025 en France et sur le reste des marchés. « On est en train de construire un lego, brique par brique ».

On résume : le paiement, Grok, Hiring, les appels vidéo et audio (sans avoir le numéro de téléphone), Spaces, Articles… sans mentionner les Communities, des forums où des utilisateurs qui partagent les mêmes intérêts peuvent échanger. À venir (il faut suivre) : une solution de streaming vidéo, notamment pour les jeux vidéo. Les utilisateurs pourront streamer sur X directement (coucou Twitch). « Généralement, les personnes live-streament ailleurs et viennent en discuter sur X : autant que cela soit permis sur X directement ». Après une année 2023 bordée de polémiques, X veut prendre sa revanche. Si les annonceurs sont désormais moins attendus, les utilisateurs suivront-ils ? Les nouvelles fonctionnalités seront-elles efficaces pour convertir les utilisateurs en abonnés payants ? Le pari est lancé.

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